"Coucher auprès du ciel, comme les astrologues..."

William Adolphe Bouguereau    Ispirazione 

Paysage

Je veux, pour composer chastement mes églogues,
Coucher auprès du ciel, comme les astrologues,
Et, voisin des clochers, écouter en rêvant
Leurs hymnes solennels emportés par le vent.
Les deux mains au menton, du haut de ma mansarde,
Je verrai l'atelier qui chante et qui bavarde ;
Les tuyaux, les clochers, ces mâts de la cité,
Et les grands ciels qui font rêver d'éternité.

Il est doux, à travers les brumes, de voir naître
L'étoile dans l'azur, la lampe à la fenêtre,
Les fleuves de charbon monter au firmament
Et la lune verser son pâle enchantement.
Je verrai les printemps, les étés, les automnes ;
Et quand viendra l'hiver aux neiges monotones,
Je fermerai partout portières et volets
Pour bâtir dans la nuit mes féeriques palais.
Alors je rêverai des horizons bleuâtres,
Des jardins, des jets d'eau pleurant dans les albâtres,
Des baisers, des oiseaux chantant soir et matin,
Et tout ce que l'Idylle a de plus enfantin.
L'Émeute, tempêtant vainement à ma vitre,
Ne fera pas lever mon front de mon pupitre ;
Car je serai plongé dans cette volupté
D'évoquer le Printemps avec ma volonté,
De tirer un soleil de mon coeur, et de faire
De mes pensers brûlants une tiède atmosphère.

Charles Baudelaire

Paesaggio

Voglio, per comporre castamente le mie egloghe,
Coricarmi accanto al cielo, come gli astrologi,
E, vicino ai campanili, ascoltare sognando
I loro inni solenni portati via dal vento.
Le mani sotto il mento, dall'alto della mia mansarda
Vedrò l’officina che canta e che spettegola;
I comignoli e i campanili, questi alberi di città,
E i grandi cieli che fanno sognare dell'eternità.

È dolce, attraverso le brume,veder nascere
La stella nell’azzurro, il lume alla finestra,
I fiumi di carbone salire al firmamento
E la luna versare il suo pallido incantamento.
Vedrò le primavere, le estati, gli autunni;
E quando verrà l’inverno e le sue nevi monotone,
Chiuderò tutte le porte e le imposte,
Per costruire nella notte i miei palazzi fatati.
Allora sognerò di orizzonti bluastri,
Di giardini, di getti d'acqua piangenti negli alabastri,
Di baci, d’uccelli cantanti sera e mattina,
E tutto ciò che l'Idillio ha di più infantile.
Il tumulto, tempestando invano i miei vetri,
Non mi farà levare la fronte dal leggìo;
Perchè sarò immerso in questa voluttà
Di evocare la Primavera con la mia volontà,
Di tirar fuori un sole dal mio cuore e di fare
Dei miei pensieri ardenti un mite cielo.

traduzione: red

Testo originale Poésie française